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25 avril 2018 3 25 /04 /avril /2018 11:30

Lors de la parution de l'Anthologie de Colette Magny, Jacques Vassal a poursuivi dans le livret la rétrospective des enregistrements de Colette Magny qu'il avait publié dans Paroles et Musiques, avec sa dernière période 1983-1997 :

 

Les derniers feux... et rythmes 1983-1997

« Je travaille très, très longtemps sur un même sujet, je suis lente... », confiait Colette Magny à Paroles et Musique à l'automne 1982. Hormis les difficultés matérielles inhérentes à la production d'un disque, c'est sans doute l'une des raisons pour lesquelles sa discographie est plus espacée dans le temps que la moyenne des artistes établis dans la chanson. A ce point de vue, elle est plus proche d'un Georges Brassens ou d'un Leonard Cohen que de quelque faiseur de tubes. En 1982, elle annonce sa collaboration à venir avec Anne-Marie Fijal. puis dans les dernières années, ce sera Michel Precastelli qui l'accompagnera.

1983 - CHANSONS POUR TITINE 33 tours, 30 cm. Chant du Monde
A présent que la France a un gouvernement et un Président "de gauche" Colette Magny ne craint plus d'être réduite par les médias et le métier à un rôle de "chanteuse de blues". Elle accepte donc de revenir au genre pour une partie de ce qui va suivre.
Cet album résulte d'une collaboration amicale et, artistiquement, très fructueuse entre Colette Magny et la pianiste et compositrice Anne-Marie Fijal. Celle-ci, également concertiste dans le répertoire classique, est connue par ailleurs pour ses musiques de films. La chanteuse la décrivait dans un court texte reproduit à l'intérieur de la pochette du disque :

"UNE FEMME-PIANO
UN PIANO-FEMME
LA MAITRISE DU PORTE-A-BOUT-DE-BRAS
L'AUDACE DU PORTE A BOUT D'AMOUR"

Le programme de Chansons pour Titine (plus tard rebaptisé Bluesy Bluesy à l'occasion d'une réédition), fort de onze plages, oscille entre reinterprétations de blues classiques noirs américains (« Strange Fruit » que chanta Billie Holiday, le traditionnel « House of the Rising Sun ou le « Young woman's blues » de Bessie Smith) et hommage aux chansons de cinéma (« My heart belongs to daddy » de Cole Porter, immortalisée par Marilyn Monroe, ou « Je cherche après Titine » de Léo Daniderff, en son temps citée par Charlie Chaplin dans Les Temps Modernes, plus près de nous « recyclée » par Jacques Brel. Ici, le collage de « Titine » après "My man" est très intéressant car, faisant suite à l'homme qui fait souffrir la femme, ayant rencontré Titine, la chanteuse a "le cœur content" et un peu plus loin "le corps content". Révélation tardive et subtile de son homosexualité à une date où faire son coming out n'était pas encore courant.
A tout cela s'ajoutent une version "swing", avec section de cuivres, du "Melocoton" de Magny, lui-même devenu un standard, tout comme "All of me", un hymne (celui du Black Panther Party, "The Meeting") et une étude "Révolutionnaire" (l'Opus 10 n°2 de Frédéric Chopin). La face 2 fait appel à d'autres pointures du jazz, comme les contrebasistes Patrice Caratini et Henri Texier, le pianiste Maurice Vander, le guitariste Claude Barthélémy ou le percusioniste Dominique Mahut (connu pour ses collaborations avec Jacques Higelin et Bernard Lavilliers). Le disque se conclut avec un poème de Verlaine sur une musique de Gabriel Fauré. C'est dire combien les idées politiques et poétiques de la chanteuse et la culture musicale ou plutôt les cultures musicales, des deux femmes se répondent et s'enrichissent mutuellement. Sur la durée de toute l'écoute, et avec la diversité d'inspiration du programme, l'osmose est totale entre la chanteuses et la pianiste. Une belle rencontre, vraiment. Elle déboucha sur une série de concerts à Paris et en tournée, dont le Festival d'Avignon qui fut pour Colette Magny une des plus satisfaisantes périodes de sa carrière scénique.

1989 - KEVORK OU LE DELIT D'ERRANCE  CD "Colette Magny Production", dist. Scalen'Disc

Un premier 33 T "Kevork" a paru d'abord, plus court que le CD. De toutes façons, le Chant du Monde ne pouvant ou ne voulant plus s'en charger, Colette, excédée, a décidé de produire elle-même cet album, son premier compact, le faisant distribuer à l'époque par Scalen'Disc, structure indépendante basée à Toulouse qui, courageusement, produisait des artistes peu connus.
Ainsi Colette Magny se trouve-t-elle quelque peu marginalisée. C'est dommage, car ce disque est un de ses plus foisonnants, et par les sujets évoqués, et par les idées musicales. A Anne-Marie Fijal succède au piano, Michel Précastelli, un homme de jazz qui connaît bien les chanteuses (il a accompagné, entre autres, Catherine Ribeiro et Francesca Solleville). Il a ici composé les musiques de près de la moitié des titres, les autres étant signés Magny. Il a, enfin, assuré la direction musicales d'une équipe de pointe comprenant, le batteur Aldo Romano, les saxos et flûtes de Richard Foy (déjà entendu dans Chansons pour Titine) , les percussions de Jean-Paul Batteilley ou le bandonéon de l'Argentin Cesare Stroccio (membre fondateur du mythique Cuarteto Cedron).
Le propos de Colette Magny est riche et complexe. A l'origine, elle avait un ambitieux projet d'opéra sur les pintades qui lui tenait vraiment à cœur, Kevork étant la dernière pintadière du Gard. Dans son projet d'opéra, il est écrit entre autres "...Son caractère insoumis la rend redoutable pour les éleveurs et tous finissent par renoncer. Pour elle, il n'est pas de terre d'asile; elle se condamne elle-même à l'errance, prix de sa liberté". On croirait y voir une description d'elle même...
En introduction du disque, une petite fille dit un conte sur les pintades. Liant un thème à l'autre, à nouveau, elle veut témoigner pour un monde qui souffre (travailleurs exploités, pollutions des mers et des fleuves, espèces animales menacées de disparition, guerres et famines en tout genre). Par exemple, "Ici les petits bateaux" qui, parti des pêcheurs du fleuve Zaïre, s'inquiète ailleurs de l'invasion touristique ou de la raréfaction des albatros, cormorans et autres fous de Bassan... Ainsi encore "Caqueta", partie du Mexique et du Brésil où demeurent "vingt millions de paysans sans terre", celles-ci accaparées par les gros propriétaires, la spéculation foncière ou les multinationales qui saccagent les forêts. La chanson englobe les paysans indiens, les "enfants des avions qui ont un drôle d'air". La musique est dominée par le piano et le bandonéon.
"Exil" décrit de poignante façon la vie d'un travailleur venu d'Afrique du Nord, immigré en France: "Peut-être frère ne te reverrai-je jamais". "Mustapha" développe le thème plus en détail : on vit dans un baraquement, "fumées et poussière sur les murs, cafards, punaises...", "la maladie est à l'usine", "on respire du plomb, toute la journée..." Une fois de plus, et comme naguère dans Magny 68/69, Colette parvient à nous faire toucher l'humain, sa souffrance la plus intime, tout en décrivant une situation sociale et économique d'une réalité glaçante. Et même une situation politique lorsque, dans "Rosa de l'amour et des jardins", elle évoque la militante communiste  Rosa Luxemburg ("Tu étais contre les bureaucrates et la guerre/ Au nom de l'efficacité ils t'ont assassinée"), avant de se réjouir de la composition du parlement d'Islande (la parité hommes/femmes en 1987) et de saluer dans ce pays "un peuple lettré".
Mais cette "leçon de géopolitique" n'a rien d'abscons ni d'ennuyeux.
Colette trouve un langage, un biais pour parvenir à l'auditeur, jusqu'à le secouer en l'aimant. Elle nous livre un fragment d'autobiographie en racontant dans « Quand j'étais gamine », «j'étais amoureuse de Monsieur Paquette »; il s'agissait du boulanger d'une période de son enfance, en Côte-d'Or; c'est chanté sur une jolie mélodie populaire. De même, elle s'amuse dans sa « Chanson gastronomique » à décliner des recettes de cuisine, sur un air de tango enlevé prestement par le piano et le bandonéon.
La révolte et la douceur. Et aussi, en prime, le fou-rire irrépressible de la chanteuse, entendu dans le morceau final. Colette Magny telle qu'en elle-même, dans un de ses disques les plus étonnants.

1991 - INÉDITS 91
CD "Colette Magny Production", distr. Scalen'Disc

Cette fois, l'autoproduction est aidée, financièremenet, par des fonds issus d'organismes tels l'ADAMI, la FCM et la SCPP : « sans eux, ce disque n'aurait pas pu exister », est-il précisé au verso du boîtier. Grâce à ce montage, Colette Magny et Michel Precastelli ont pu à nouveau réunir une bonne équipe de musiciens combinant, autour des claviers, contrebasse, batterie, percussions, saxos ténor et soprano, flûte et même un quatuor à cordes. A la fin août 1981, ils enregistrent aux studios « Sysmo Records ».
Le voyage commence par un rap long de 11 minutes. Le rap est alors en plein essor, en France comme aux États-Unis et ailleurs. Colette ne suit pas les modes, elle les anticiperait plutôt. Elle a déjà été pionnière du genre en 1972, avec « Répression » entre autres, l'année où paraissaient « Il n'y a plus rien » de Léo Ferré ou « Paix » de Catherine Ribeiro et son groupe Alpes. Colette prolonge l'expérience, y compris bien sûr - et comme ces deux artistes amis - dans sa dimension politique (industrie nucléaire, guerre en Irak, femmes dans la misère, centres commerciaux "qui poussent comme des champignons", banlieues "poudrières", danger du sida, etc) avec un avec un « Rap'toi d'là que j'm'y mette » long de 17 minutes et ouvert, sur scène à l'improvisation.
Le reste de l'album, hormis quelques nouveautés comme « La parole doit sortir du coeur » ou « L'eau c'est la souffrance des femmes », en d'« inédits », fait la part belle au blues, au folksong même (elle interprète le classique « 900 miles » de Woody Guthrie) et à la poésie française chantée, notamment Rimbaud et Hugo, avec de nouvelles versions de la « Chanson de la plus haute tour » et des « Tuileries ». Et « Melocoton » est aussi revisitée, « dépoussiérée » musicalement, avec le concours de Michel Precastelli. Cette chanson trop connue, réductrice, qui avait fini par la lasser, la chanteuse se la réapproprie finalement.
En conclusion de notre interview de 1982, à la question de savoir si elle recommencerait le parcours, au cas ou l'on remonterait les compteurs à 1962, elle répondait « Ah oui, sincèrement. Pourtant, c'est dur, ça l'a été surtout ces deux dernières années. Mais j'ai été, gratifiée au-delà de ce que j'aurais pu espérer. J'étais déjà contente, quand je travaillais à mon bureau, qu'il y ait deux ou trois copains pour aimer ce que je chantais. Maintenant, je reste peut-être inconnue du « grand public », mais il y a mettons 40.000 personnes qui connaissent ce que je fais, c'est fabuleux, même s'il faut supporter les difficultés que ça entraîne ».
« J'ai pris des goûts de liberté, non seulement d'expression, mais de vie, tels qu'il me serait impossible de revenir en arrière, de faire autre chose. Quoique j'aie du mal à le faire, en ce moment. Il y a plus de douleur que de jouissance, au moment d'écrire. Pourtant, celle fois-ci, il s'agit d'écrire non plus sur les autres, mais sur moi. Là, je sais de quoi je parle, quand même ! Au fond, peut-être que j'ai du mal parce que ça engage plus, quand on parle de soi-même ? »
C'est peut-être cela, une « chanteuse engagée »...
Jacques VASSAL (avril 2018)

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25 avril 2018 3 25 /04 /avril /2018 09:39

Le 18 mai sortira une compilation composée de 2 CD de Colette Magny.

L’événement est annoncé par la maison d'édition :

"Afin de célébrer le 50ème anniversaire de mai 68, revisitez une époque historique et révolutionnaire avec Colette Magny, une grande chanteuse engagée du paysage musical français ! Redécouvrez Colette Magny au travers d’une compilation 2 CD regroupant ses meilleures chansons. Un répertoire d’influences jazz qui puise dans les standards américains, comme «Strange Fruit» ou «Saint James Infirmary», met en musique poètes et philosophes – Rilke, Rimbaud, Aragon, Victor Hugo… – et crée ses propres chansons à thèmes politiques et poétiques. Colette Magny est une artiste qui a façonné le paysage musical français, et qui fait encore parler d’elle aujourd’hui, notamment dans l’émission «Boomerang» sur France Inter, lors de laquelle Orelsan récite un de ses textes sur un sample de «J’ai suivi beaucoup de chemins» pour terminer sur la voix remarquable de Colette".

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24 avril 2018 2 24 /04 /avril /2018 08:23

Vient de paraître "Sous les pavés : une anthologie des airs rebelles et engagés !" de Stan Guesta (Ed. Licences, 35 €) :

En choisissant 68 chansons qui ont marqué les esprits et leur temps un peu partout à travers le monde, Stan Cuesta propose un voyage dans l’histoire de la chanson populaire mondiale sous un angle original, celui de la contestation, pour célébrer « l’esprit de mai 68 », moment clé d’un désir de changement politique et social en France, alors que parallèlement, de l’autre côté de l’Atlantique, la colère monte contre la guerre du Vietnam.

Au fil de ces évocations, on croise aussi bien Boris Vian que Bob Dylan, Léo Ferré que John Lennon, Jacques Dutronc que Colette Magny, The Cash ou NTM... Les idéologies passent, les révolutions triomphent ou échouent, mais les chansons populaires, quand elles sont bonnes, demeurent et traversent le temps, survivant bien souvent aux idées qui les ont engendrées, grâce à la simple magie d’un rythme, d’une mélodie. Et elles finissent par définir leur époque de façon plus immédiate et sensible que ne pourront jamais le faire tous les livres d’histoire.

Au sujet du disque Vietnam 67 de Colette Magny, Stan Guesta écrit :

Colette Magny (1926-1997) vient à la chanson sur le tard, après avoir connu le monde du travail et l'engagement politique. C'est sans importance, car elle n'appartient pas à l'univers de la variété jetable- où l'âge et l'apparence comptent plus que la voix ou la qualité des chansons. Son royaume, au départ, c'est le blues, notamment celui de Bessie Smith, l'une de ses idoles, dont elle reprend les classiques. Pourtant, dès son premier disque en 1963, elle obtient un succès imprévu avec le fameux "Melocoton", une chanson accrocheuse sur laquelle sa voix puissante et incroyablement expressive fait des merveilles.

Très vite, elle s'éloigne de la chanson "de divertissement", désireuse de chanter le quotidien, la vie, la peine de gens, le travail, les luttes... Le show bizness ne comprendra jamais sa démarche, à l'image de , célèbre guitariste américain Mickey Baker qui l'accompagnait sur ses premiers disques CBS et qui lui dit « Va faire tes chansons communistes qui ne rapportent pas un centime… »

Et c'est ce qu'elle fait, quittant CBS pour Le Chant du Monde, fameux label proche du parti communiste, qui publie de nombreux compositeurs russes et des chanteurs engagés comme Léo Ferré. À ceux qui lui réclament son «tube », elle répond souvent : "Melocoton est mort au Vietnam". Car la guerre du Viêt-Nam va devenir le sujet de l'un de ses grands albums révolutionnaires gravé en 1967. La chanson titre, moitié parlée, moitié chantée, met en scène des combattants vietnamiens. Clin d’œil à un passé pas si éloigné, elle y glisse la phrase la plus connue de "Melocoton" : "Vietnam 67 / Van Phan Dong m'a dit / Viens donne-moi la main/ Tu verras, ici, c'est la guerre des vélos." C'est une pure chanson militante, presque comme une harangue, qui se termine par : "Ho Chi Min vous l'a dit / Nous ne nous laisserons pas intimider / Vietnam 67 / Longue vie au peuple vietnamien".

Pourtant, là ou ce genre de chanson est généralement rasoir et sans intérêt, celle-ci s'élève au rang d'oeuvre d'art grâce à la voix de Magny et à sa musique, en elle-même révolutionnaire. La chanteuse s'est en effet éloignée du blues pour se rapprocher du free jazz, style alors très en vogue, principalement dans les milieux d'extrême gauche puisqu'il symbolise la liberté absolue en musique. Elle enregistrera d'ailleurs avec les meilleurs musiciens comme ici le bassiste Beb Guérin ou, plus tard, le pianiste François Tusques.

L'année suivante, Mai 68 est à la fois une surprise et un moment crucial pour Colette Magny. Les cinéastes Chris Marker et William Klein lui prêtent des enregistrements des « événements». Elle les monte, avec des chansons comme "Ensemble" ou "Nous sommes le pouvoir", en un collage sonore qui devient le disque 68-69. Couplé au précédent, il sera réédité en 1983 sur un CD titré Vietnam 67/Mai 68, superbe document d'époque sur le véritable esprit de Mai 68.

 

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Sur la même thématique, signalons également la parution du livre "Sucré amer 1968 - Une révolution en chansons et musiques" de Jean-Michel Sananès (Ed. Chemins de Plume, 14,00 €). 

Le compagnon d'une chanteuse folk rencontre les chansons d'une jeunesse américaine engagée pour les droits civiques et pour le respect de la nature. Ce nouvel humanisme enflammera la jeunesse mondiale. Grâce à lui, le narrateur découvre l'espoir et l'envie de se battre pour un monde meilleur. D'extraits de chansons en réflexions, nous découvrons les mots, les musiques et les hommes qui, hors des partis politiques, ont construit l'idéologie subliminale de cette décennie 68 qui a changé les consciences et aurait pu modifier le monde. Dans cet ouvrage, se croisent l'amour, la poésie, la musique, la drogue et la descente aux enfers de certains, les événements politiques, les brutalités de l'Histoire, l'arrivée des grandes ONG, l’espoir et, finalement, la désillusion :

"Je me souviens de vous, je me souviens de nous, je me souviens de tout,et de ces affiches qui fleurissaient z Sous les pavés la plage ; Vos rêves les plus fous ne sont pas à la taille de nos espérances ; Salaires légers chars lourds ; La police à l ’ORTF la police est chez vous. C'était un temps désespéré où le rêve et l'espérance se heurtaient au cynisme et à l‘indifférence des pouvoirs. Je me souviens de Paco Ibanez chantant: La poésie est une arme chargée de futur, de Renaud et son Crève salope, de Colette Magny jetant son blues sur la misère des hommes, de Léo Ferré et son Ni Dieu ni maître, de Claude Nougaro posant son Bidonville sur le désespoir des exclus, de Country Joe Mac Donald à Woodstock, de Brigitte Fontaine et sa folie dans laquelle je me reconnaissais. Je me souviens de tous. Sur les murs j'avais écrit : "Ils ont la matraque, nous avons l'espoir". Nous, nous étions là où les hommes souffraient, avec Martin Luther King et Mandela, et avec tous ceux qui voulaient l'égalité entre les hommes. Nous étions frères d'Allende et de Victor Jara. Nos poètes s'appelaient Pablo Neruda, Allen Ginsberg, Keith Barnes. Lennon chantait Give Peace a Chance. Jack Kerouac nous abreuvait de sa mute. Nous pleurions Jan Palach et les suicidés de Prague. Je me souviens de tous, des refuzniks, de Ravi Shankar, Bob Dylan, Georges Ham‘son, Ringo Starr, chantant contre le génocide du Bangladesh et de Paul Kantner dénonçant dans 7eme Mère, les crimes écologiques. Je me rappelle ces américaines réclamant l’égalité "homme femme", Sacco et Vanzetti nous revenant plein cœur dans une chanson de Joan Baez. Je me rappelle une musique qui se réinventait et un Folk Song qui portait la bonne parole. Je me souviens de vous, je me souviens de tout. J e me souviens de ceux qui sont partis et de ceux qui restent Je me souviens d'un temps où l'éthique voulait prendre le pouvoir.
Encore parfois je rêve
."
 

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5 avril 2018 4 05 /04 /avril /2018 20:12

Lu dans Ouest France :

 

La 7e édition d'Éclats de femmes, des rencontres cinématographiques autour des genres et du féminisme, organisées par le Festival de cinéma de Douarnenez, se tiendra du jeudi 5 au dimanche 8 avril.

Au programme : [...]

Samedi 7, à 20 h 30, à l'auditorium du Port Musée : soirée autour de la figure de Colette Magny, avec une projection de La chanson politique de Colette Magny, d'Yves-Marie Mahé, suivie de Rhodia 4X8, un film du groupe Medvedkine de Sochaux, puis des images d'archives inédites, issues des archives départementales de Seine-Saint-Denis. Le tout en présence de Tangui Perron, en charge du patrimoine à Périphérie. Prix libre (conseillé 4 €).

 

 

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5 avril 2018 4 05 /04 /avril /2018 15:40

Dans son  dernier livre "Des étoiles & des chiens - 76 inconsolés" (Le Castor Astral éditeur, 208 pages, 15€), Thomas Vinau consacre un poème à Colette Magny :

 

Un jour Victor Hugo a fait l'amour à Billie Holiday
Et Colette Magny est née
Un jour Léo Ferré a eu les couilles d'être une femme
Et Colette Magny est née
Un jour un fils d'esclave a envoyé une bouse bien fraîche dans la tronche de son contremaître
Et Colette Magny est née
Un jour quetzalcoatl est revenu voir le Chili sur le dos d'une fourmi
Et Colette Magny est née
Un jour la colère d'une secrétaire timide a éclaté au nez de son patron
Et Colette Magny est née
Un jour Apollinaire est allé au Vietnam main dans la main avec Rilke
Et Colette Magny est née
Un jour un ouvrier est parti pisser, personne ne l'a jamais revu
Et Colette Magny est née
Un jour un paysan a fait danser la révolution
Et Colette Magny est née
Un jour les Black Panthers ont fait un pique-nique dans un fossé de Villefranche-de-Rouergue
Et Colette Magny est née
Un jour l'orage a improvisé un free-jazz dans une flaque d'eau
Et Colette Magny est née
Un jour un bouledogue a pleuré une berceuse
Et Colette Magny est née
Un jour le soleil a ri à gorge déployée
Et Colette Magny est née
Un jour un terrain vague a sauvé un cerf-volant
Et Colette Magny est née
Melocoton

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2 avril 2018 1 02 /04 /avril /2018 10:19

Le 16 mars et le 1er avril, le Hall de la chanson à Paris proposait un spectacle avec Maïa Foucault et le guitariste Joachim Machado autour des chansons de Colette Magny.

En préambule, Maïa Foucault s'excuse pour le programme décousu car il lui semble difficile de balayer en quelques chansons la grande diversité de l’œuvre de Colette Magny. C'est la raison pour laquelle elle fait le choix d'alterner chanson et lecture de textes. Textes pour lesquels, on regrette des erreurs dans les attributions du nom de leur auteur : "La mort me hante" n'est pas d'Antonin Artaud mais de Colette Magny et Co-opération n'est pas un poème de Jean-Paul Sartre mais un cut-up de textes de Sartre, Suarez, Karleil et Alain.

Maïa Foucault et Joachim Machado apportent leur touche de légèreté, de sensibilité et parfois d'humour dans leur interprétation. Mais c'est certainement leur version de Ras la trompe qui se montre la plus inspirée.

 

A noter que le duo se rejouera le vendredi 25 mai lors des journées "Mai 68 et la chanson [avant, pendant, après]" les 25, 26 et 27 mai prochains. Le Hall de la chanson met en effet Colette Magny à l'honneur (parmi d'autres) lors de ces journées, ponctuées de rencontres, d'universités chantées, de spectacles, et bien d'autres activités, pour revenir sur la manière dont la chanson française a été marquée par Mai 68.

 

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12 mars 2018 1 12 /03 /mars /2018 13:22

 

Dans le cadre du Festival de duos Enfin Seuls! au hall de la chanson (Parc de la Villette à Paris), Maïa Foucault reprend les expérimentations de Colette Magny, accompagnée du guitariste Joachim Machado.

Représentations le vendredi 16 mars à 20h et le dimanche 1er avril à 17h.

Plus d’info : 01 53 72 43 00 - communication@lehall.com - http://www.lehall.com/vivez-participez/spectacles-et-concerts/dactylographe-du-coeur-colette-magny

 

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6 mars 2018 2 06 /03 /mars /2018 19:50

Vendredi 23 Mars 2018, à partir de 18 h 30 au Collège St Michel de Cambo (64) :
Soirée de soutien aux prisonniers politiques basques et à leurs familles : « PRESOEKIN ELKARTASUNEZ » à Cambo dont est originaire Lorentxa BEYRIE, emprisonnée depuis 17 ans.
Comme l’an dernier, nous continuerons à dire que le chemin vers la Paix se fera avec la participation des prisonniers et de leurs familles, car plus que jamais ils sont partie prenante du mouvement civil des artisans de la paix en Pays Basque.
Comme d'habitude, cette soirée est organisée autour de l'abbé Mikel Epalza, une semaine avant la fête pascale et l'Aberri Eguna, en soutien aux prisonniers politiques basques et à leurs familles, tous attendant avec impatience un rapprochement du Pays Basque. Les lettres écrites par les prisonniers et les témoignages des familles y seront lus, et les chants accompagnés par les musiciens habituels.


Cette soirée de réflexion, de chants et de prières se terminera par la projection d’une présentation courte (47’13’’)  d’un film consacré à la chanson des années 1970 « Ez  ez dut nahi »… « version Camarade curé », chantée par Colette Magny,  en présence de son réalisateur : Pierre Prouvèze.

CAMARADE-CURE EZ EZ DUT NAHI euskal abestian idatzitako abesti honen genealogia da. Colette Magny-ren urratsetan ari gara Euskal Herrian. Aurkezpen laburra (47'13 '').

Une collation permettra de prolonger cette rencontre dans une ambiance conviviale.

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6 février 2018 2 06 /02 /février /2018 11:23

Sur son site Nos enchanteurs, Michel Kemper consacre un article à la sortie du triple CD "Colette Magny - De Melocoton à Kevork", sous le titre "Colette Magny : on n'a pas tous les jours vingt ans" :


 

Bien sûr, il y eut le cercueil de Johnny Hallyday et la dépouille de France Gall. Bien sûr, il y eut ce trop copieux anniversaire de la mort de Barbara, avec son overdose de disques et de livres, d’émissions, de concerts de reprises… Les médias ne savent plus qu’en faire trop, tout le temps, tant que leur zèle suspect salope presque la mémoire de ceux qu’ils croient ainsi honorer.

Au moins, Colette Magny fut préservée de ces dégoulinants hommages. Colette qui ? C’est bien simple, la date anniversaire des vingt ans de sa disparition est passé inaperçue. C’est un rapt de mémoire, un rapt sans rançon. Sans son. Ce fut en juin dernier, le 12 s’il nous faut être précis, dans un grand silence. L’emmerdeuse qu’elle fut le méritait sans doute par ce show-biz qu’elle conspuait.

Qui se rappelle que Magny, au sortir d’un triomphe à La Contrescarpe puis d’un passage remarqué au Petit conservatoire de la Chanson se hissa au hit-parade de Salut les copains puis fit l’Olympia au même programme que Sylvie Vartan. Magny y vole le show, et la vedette à la jeune chanteuse, remportant là un triomphe inattendu. Mais y’a comme erreur sur l’étiquette… Car son premier disque ne laisse place à aucune ambiguïté : si l’elliptique Mélocoton nous parle d’enfance, deux reprises de Bessie Smith signent le blues de Magny, et le quatrième titre ce qui sera la dominante de l’œuvre de cette dame : la politique. C’est Co-opération : « Lorsque l’humanité sera enfin sage / Nous passerons de la compétition dans l’individualisme / A l’individualité dans la co-opération. » Le ton est donné : jamais plus il ne variera. Son chemin était tout tracé dans le métier où elle serait la chanteuse Bleu blanc blues. Elle qui venait déjà de fuir le trajet trop balisé d’une carrière de fonctionnaire n’allait pas repiquer au truc et docilement (!) faire là où on le lui demandait. Qui matera Magny n’était pas, n’était plus né. Quitte à avoir un micro, autant gueuler et c’est ce qu’elle fit. Elle le paya au prix fort, mise en quarantaine et pour toujours des sunlights.

De Melocoton à Kevork, d’un point à un autre, de son premier album, en 1965, à son ultime, en 1989, même s’il parut ensuite, en 1991, un album d’inédits. Kevork (saga de la pintade, volatile venu d’Afrique, volaille d’élevage qui peut, en s’échappant, redevenir sauvage) pour lequel Magny, sans un sou, fit appel, bien avant que naisse le financement participatif, à la souscription publique, alors relayée par l’hebdomadaire Télérama. La composition de ce triple album se veut rendre compte des diverses formes d’écriture pratiquées par Colette Magny, de la forme classique (La terre acquise, Quand j’étais gamine…) à celle affranchie des contraintes chansonnières (Salem, Chronique du Nord…) ; la prochaine parution abordera, elle, ses mises en musique de textes (Rimbaud, Artaud, Billie Holiday, Louise Labé…) dont elle n’est pas l’auteure.

Tout Magny est là, longitude et magnytude d’une impétueuse chanson et d’irréductibles combats au service, toujours, des minorités, de plus petits que nous. Une chanteuse d’art et de colères. Avec des formes d’écriture (de rimes conventionnelles à des chansons-collages) et de musiques (le blues, le jazz, le free-jazz) qui ont su ouvrir des portes, hélas bien peu fréquentées par d’autres.

Bernard Ascal et les éditions EPM font ici ce que le métier a oublié : le plus simple, le plus rudimentaire mais nécessaire hommage à la Magny. Vingt ans après, il est toujours possible de la découvrir, de s’enticher de sa liberté.

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1 février 2018 4 01 /02 /février /2018 13:49

Au cinéma L'Ecran, à Saint-Denis (14 passage de l'Aqueduc), un ciné-conférence hommage à Colette Magny est au programme le jeudi 8 février à 20h45 dans le cadre du Festival Rebel Rebel.

Le film "La chanson politique de Colette Magny" sera projeté et la conférence qui suivra, en présence du réalisateur Yves-Marie Mahé, sera animé par Tangui Perron, historien, chargé du patrimoine audiovisuel à Périphérie.

"Colette Magny, une vraie rebelle
Pour être un rebelle, même si on est chanteuse ou chanteur, il n’est pas obligatoire de mourir à 27 ans (tels Amy Winehouse, Kurt Cobain ou Jimi Hendrix). Colette Magny, ancienne dactylo, décédée trop tôt (à 71 ans tout de même, en 1997) est aussi une rebelle. De sa voix, elle aurait pu faire un viatique pour devenir une diva du jazz (à sa mort, le chanteur Arno affirma que c’était la plus grande chanteuse de blues en France). Colette Magny décida non seulement de chanter mais aussi de crier, gueuler, lutter. Célèbre, elle envoyait chier les journalistes de la télé. Oubliée, elle s’est battue pour poursuivre ses rêves et sa révolte. Durant « les années 1968 », elle fut de toutes les luttes, fêtes et comités de soutien, des meetings de Penarroya à la Fête de l’Huma. Elle réalisa un disque avec des enfants handicapés mentaux; se moqua aussi bien des militants-militaires que d’elle-même, en se foutant du bon goût – en 1984, elle demanda si la grande scène de la Fête de l’Huma pourrait supporter son poids et celui de Brenda Wootton. Capable de violence, sa mise en musique du poème de Victor Hugo Les Tuileries est d’une grande douceur (elle est aujourd’hui reprise par Bertrand Belin et Camélia Jordana). Mais arrêtons de lui jeter des fleurs. Elle ne fut pas la seule. Catherine Ribeiro est une sœur déchirée. François Tusques lui apporta sa collaboration et son talent. Sa maison de disque Le Chant du Monde, créée en 1937 par le PCF et l’Internationale communiste pour soutenir la République espagnole, ne la lâcha pas.
Les rebelles sont souvent des étoiles filantes qui laissent des traces éphémères et des souvenirs éblouis, pas plus. Mais l’on redécouvre aujourd’hui l’héritage de Colette Magny. C’est une rebelle révolutionnaire." Tangui Perron

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